Le goût de la feuille blanche
Au début, il y a le vide. « J’adore la feuille blanche», relève Laurent Balmelli. Dans un tourbillon d’idées et d’images, il raconte, avec une grande humilité, comment il a fait de ses différences, ressenties depuis l’adolescence, des forces. « Je n’ai jamais été le meilleur mais j’ai toujours été créatif. Au début de mes études à l’EPFL, j’ai failli abandonner. Je me sentais en quelque sorte illégitime. » C’est pourtant durant cette période qu’il comprend comment dépasser ses limites. Ou plutôt, celles qu’il se mettait alors, en quelque sorte intimidé par ce qui existait déjà.
C’est son doctorat qui lui a appris à surpasser les pensées limitantes pour décupler sa créativité. Il est marqué par les mots de son professeur de thèse, Martin Vetterli, ancien président de l’EPFL, qui lui a conseillé de ne jamais rien prendre pour acquis. « Il me disait de ne pas me laisser influencer par ce qui avait déjà été publié. C’est en essayant de me détacher du poids de l’existant que tout à coup, j’ai pu mettre le doigt sur quelque chose de nouveau. »
Après son doctorat en systèmes de communication, il travaille chez IBM dans la division de recherche à New York, puis à Tokyo. Cette division est spécialisée dans la création de nouveaux produits et services qui sont brevetés par IBM et licenciés mondialement. C’est un des rares endroits au monde où le but quotidien est d’inventer. Pendant 12 ans et en collaboration avec ses collègues, il deviendra le coauteur d’une douzaine d’inventions dont certaines finiront dans le Playstation de Sony (créée en collaboration avec IBM), mais aussi de nombreux produits de l’aérospatiale, une industrie importante pour IBM. C’est d’ailleurs cette connaissance dans le domaine de l’invention et dans sa protection qui l’a motivé à inclure une stratégie de propriété intellectuelle dans ces propres entreprises.
Il quitte IBM pour revenir en Suisse et y élever ses deux enfants, il se donne un peu plus d’un an de temps libre pour réfléchir à la suite. C’est cette parenthèse qui lui a permis de se consacrer à la lecture et à l’introspection. « Je me suis trouvé dans l’incertitude. Je n’ai pas cherché d’emploi car je voulais voler de mes propres ailes pour la première fois de ma vie. C’est le paradoxe de la découverte de soi en se sentant perdu, quelque part. Sur le moment, c’est plutôt désagréable mais quand on y repense, ces petites périodes charnières sont les plus intenses ! »